Arrives en fin d’apres-midi dans la ville la plus haute du monde (4090 m), on se met directement a la recherche d’un hotel et d’une agence pour partir visiter les fameuses mines de la montagne surplombant la ville : le Cerro Rico (colline riche). Mais avant tout, un petit peu d’histoire afin de mieux comprendre ce qu’on vient faire ici et pourquoi ces mines sont si “fameuses”.
C’est au 15eme siecle que les Espagnols apprennent que cette montagne est remplie d’argent et vont commencer a l’exploiter. C’est aussi a ce moment qu’une des pages les plus pathetique de l’histoire humaine va s’ecrire. L’exploitation va prendre une telle ampleur que vers la fin du 16eme, Potosí etait plus important que Paris et Londres (180’000 habitants) !!! Les mines deviennent les plus prolifiques du monde, on en retira plus de 47 millions de tonnes d’argent BRUT en 200 ans !!! A cette epoque, tout cet argent fut envoye en Espagne, qui pour payer ses diverses dettes, le gaspilla sur tout le vieux continent. C’est en quelque sorte grace a ce tresor que le systeme capitaliste europeen a vu le jour !!!
Mais le plus triste dans cette histoire c’est que des millions d’Indiens ainsi que des Noirs importes d’Afrique seront obliges d’y travailler et quasi tous y mourront. Au total, plus de 8 millions y laisseront leur vie des suite de maladies, d’epuisement, d’accident ou au contact avec des produits toxiques. Un veritable genocide ! Mais au debut du 19eme, les bons moments semblent fini car les filons d’argent s’epuisent et Potosí tombe rapidement en decadance (10’000 habitants vers 1850). Mais la decouverte et l’exploitation de l’etain relance quelque peu l’economie.
Voici donc en resume ce qui s’est passe ici. Aujourd’hui, ces mines continuent d’etre exploitees, mais seulement par quelques habitants de la ville qui se sont regroupes en cooperatives et bien souvent, se sont des familles entieres qui y travaillent. Malgre les divers progres que la planete a fait en 400 ans, ces gens travaillent toujours comme a l’ancien temps (outils et surtout conditions). Ils creusent toujours au pic et au marteau et utilisent encore les vieux wagons qui pesent super lourd.
Avant d’arriver aux mines, on commence par se vetir d’une combi, botte, casque et frontale. Puis, on se dirige vers le marche ou on peut acheter quelques presents pour les mineurs et leur famille. Sont en vente : feuilles de coca (unique nourriture durant leur travail : environ 14 heures par jour), cigarettes, alcool pur a 96 degres, … et surtout de la dynamite !!! Comme les prix sont derisoirs, on leur amenera 1 pack avec un peu de tout. Marrant et pas tres rassurant de savoir que l’on tient entre nos mains 1 joli baton de dynamite pour moins de 1 $ !!!!
Quelques minutes plus tard, on arrive devant une des nombreuses entrees accompagnes par notre guide. Il faut savoir que cette montagne est plus trouee qu’un morceau d’Emmental et qu’une gallerie peut avoir jusqu’a 4 ou 5 niveaux et descendre jusqu’a 450 metres. On debute la descente et si les 1ers metres se font tranquillement, ca se corse super vite : on se plie en 4 pour pouvoir passer, descente d’echelles a la verticale (et quand y en a), … On passera quasi 2 heures a crapahuter a 4 pattes et les pieds dans la boue.
Mais ca, c’est rien du tout. Le plus hallucinant est d’imaginer que des gens y passent toute la journee et surtout toute une vie. On est tres captive par ce que que nous raconte notre guide car il a vecu 11 ans dans cet enfer. Ca fait 2 ans qu’il a quitte ce monde si particulier, mais sa voix est encore chargee de sentiment et de souvenirs. Pour lui, tout a commence a 15 ans, mais certains s’y “enferme” des l’age de 13-14 ans et pour un salaire miserable d'environ 7 $ par jour !!! Les hommes se retrouvent au fond des mines et les femmes a l’exterieur pour trier le minerai. Esperance de vie : 45 ans ! En general, les hommes meurent tous de sillicose ou d’accidents dus a la dynamite.
En route, on croisera 1 mineur (ben oui, c’est dimanche donc pas beaucoup de monde qui bosse) avec qui on echangera quelques mots et a qui on donnera la dynamite. Il la fera exploser quelques minutes plus tard, mais nous, on etait deja un peu plus loin donc on entendra que le bruit et les vibrations (on va pas s’en plaindre !).
A un changement de niveau, on tombera sur “El Tio”, statue reprensentant le diable pour les espagnols, mais Dieu pour les mineurs. Ceux-ci lui amenent divers offrandes (feuilles de coca, cigarettes, alcool, …) pour qu’il les aide a trouver une bonne veine de minerai ou tout simplement pour en ressortir VIVANTS.
Quand on sort de la mine, on a du mal a ouvrir les yeux et surtout a bien comprendre ce qui se passe sous terre … impression super etrange … la “visite” ne laisse en tout cas pas indifferent, c’est du Germinal vecu en direct !!!
